Droit de retrait, clause de conscience, liberté d’expression, les salariés cherchent des outils juridiques pour défendre leurs engagements en entreprise.

Éthique, convictions personnelles, engagements forts (surtout en faveur de la protection du climat), c’est à ce titre que de plus en plus de salariés refusent de réaliser certaines tâches ou de traiter directement avec certains clients prenant le risque du licenciement.

En effet, le Code du travail ne permet pas au salarié d’invoquer son éthique pour refuser d’accomplir une de ses missions. Toutefois, la liberté d’expression dont il jouit pourrait un moyen de faire respecter ses convictions.

Le principe de subordination

Chaque salarié a le droit de manifester une opposition, une divergence de point de vue avec son employeur. Cependant, lorsqu’il est question du respect des missions imposées dans le contrat de travail, les entreprises ont le droit de leur côté. « La subordination juridique qui caractérise le contrat de travail impose au salarié d’exercer en se conformant aux ordres qu’il reçoit ou aux instructions qui lui sont données », rappelle Anne Vincent-Ibarrondo, avocate, associée du cabinet Voltaire.

Deux exceptions à ce principe : le comportement fautif de l’employeur ou un ordre illégitime. Imposer de travailler avec un client ou de prendre l’avion comme mode de déplacement ne rentre pas dans ces catégories.

Si vous vous y opposez, vous risquez une sanction pour violation du contrat de travail.

Ni de droit de retrait ni de clause de conscience

Certains salariés tentent donc de faire valoir leur droit de retrait, lorsque les circonstances vont à l’encontre de leurs engagements.

Or, la situation d’inconfort passager, de nuisance n’est pas un danger grave et imminent justifiant l’exercice du droit de retrait. « Le Code du travail pose un droit de retrait au sens de l’intégrité physique de la personne. Il n’est pas l’outil adéquat », confirme Anne Vincent-Ibarrondo.

Á retenir : L’article L4131-1 du Code du travail

« Le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Il peut se retirer d'une telle situation.  L'employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection. »

Faire valoir une clause de conscience pour ne pas réaliser une tâche ne fonctionne pas non plus.

D’ailleurs, dans la plupart des cas, le contrat de travail ne contient aucune clause de conscience, c’est un abus de langage. Au sens juridique du terme, elle n’existe que pour quatre professions : les médecins, les avocats, les fonctionnaires et les journalistes.

La définition à retenir : La clause de conscience permet à un salarié de suspendre ou de rompre ses obligations si certaines de ses conditions de travail vont à l’encontre de sa conscience.

Une extension de la liberté d’expression

Il serait donc impossible de faire valoir son éthique en entreprise ?

La discussion avec le service des ressources humaines ou son supérieur hiérarchique est à privilégier. En effet, les entreprises ont tout intérêt à composer avec des convictions, particulièrement en matière de climat, afin de rester attractives.

Le rapport de force juridique commence aussi à s’inverser. « La liberté d’expression du salarié n’est plus seulement écrite ou verbale. Elle est également la liberté de s’abstenir de faire ou participer à quelque chose », reconnait David Guillouet, avocat associé du cabinet Voltaire Avocats.

Dans un arrêt rendu le 9 novembre 2022, la Cour de cassation a posé le principe que les valeurs d’une organisation trouvent ses limites dans la liberté d’expression et d’opinions de ses salariés.

Un employeur ne peut pas imposer, au nom de sa culture d’entreprise, des pratiques risquant de portant atteinte aux libertés fondamentales de ses salariés.

 

À lire aussi : Ne pas participer à un apéro est-il un motif de licenciement ?

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