
Les coupures électriques prévues cet hiver relèvent du pouvoir de police de l’État. Il risque d’être compliqué pour les entreprises d’être indemnisées de leurs pertes.
Le gouvernement ne s’en cache pas. Il risque d'avoir des coupures d’électricité cet hiver, si le besoin s’avère plus élevé que la production, ralentie par différents facteurs.
Cette situation exceptionnelle traduit les pouvoirs de police de l’État et la sécurité d’exploitation de l’électricité. Pour les entrepreneurs, obtenir indemnisation d’une éventuelle perte du chiffre d’affaires s’annonce compliqué.
Des mesures nécessaires et proportionnées
Depuis plusieurs jours, le gouvernement prépare les citoyens à des coupures d’électricité cet hiver. Une cellule interministérielle de crise a même été activée pour anticiper la mise en œuvre éventuelle du plan national de délestage. « Le gouvernement est habilité par le législateur à prendre ces dispositions », explique Fabrice Cassin, avocat spécialiste du droit de l’énergie, associé du cabinet LPA-CGR Avocats.
Ces mesures d’organisation de la distribution d’électricité apparaissent pour la première fois avec la loi du 29 octobre 1974 relative aux économies d'énergie durant le premier choc pétrolier. Au nom de son pouvoir de police, l’État dispose de moyens pour assurer les bonnes exploitation et distribution de l’électricité, même en pleine période hivernale. Plusieurs articles du Code de l’énergie encadrent ces scénarios.
Le texte à retenir : L’arrêté du 5 août 2022 relatif au critère de sécurité d'approvisionnement électrique définit le critère de défaillance et fixe le critère de sécurité d'approvisionnement du système électrique. |
L’alimentation en électricité peut être restreinte, temporairement, ou suspendue lorsque les conditions normales d’exploitations ne peuvent pas être assurées ; en cas de baisse des fréquences des réseaux électriques ; lors de surcharges anormales sur des ouvrages de transport ou de distribution sans report possible sur d'autres ouvrages et en cas de chutes de tension. Depuis le début de la guerre en Ukraine nous sommes dans le premier cas.
Toutefois, « les mesures de police doivent être nécessaires et proportionnées », rappelle l'avocat. Il revient aux préfets d’organiser les modalités des coupures. Aidés par la circulaire fournie par le cabinet du Premier ministre le 30 novembre et en étroite collaboration avec le gestionnaire du réseau RTE, ils prendront un arrêté préfectoral et préviendront la population. « La durée du délestage est européenne afin de permettre un approvisionnement transfrontalier », ajoute Fabrice Cassin.
À retenir : On parle de « défaillance du réseau électrique » lorsque la durée moyenne de délestage assure l’équilibre entre l’offre et la demande et ne dépasse pas deux heures par jour. |
Dans le détail, vous serez prévenu du risque de coupure trois jours à l'avance via un signal Ecowatt rouge adressé par RTE. La veille de la coupure, RTE donnera à 15h la liste précise des départements concernés.
Aux préfets aussi de prévenir les entreprises concernées par le délestage, d’organiser les services d’urgences et de trouver des solutions aux personnes hospitalisées à domicile.
Bon à savoir : À partir de 17h la veille de la coupure, vous pourrez renseigner votre adresse sur le site de RTE ou d’Enedis pour savoir si votre domicile est concerné ou non. |
Un préjudice anormal et spécial
Reste un sujet de taille pour les entreprises qui subiront les coupures d’électricité et qui ne seront pas équipées de groupes électrogènes pour y faire face. Comment pourront-elles être indemnisées ?
Le gouvernement ne prévoit pour le moment aucune aide particulière.
Si vous estimez que ces coupures ont porté préjudice à l’activité de votre entreprise, rendez-vous devant le juge administratif. Vous pourrez tenter de mettre en cause la responsabilité de l’État pour rupture d’égalité devant les charges publiques.
Pour cela, il faudra démontrer un préjudice anormal et spécial au juge. « Il faudra, par exemple, montrer que la baisse du chiffre d’affaires est spécifiquement liée à cette coupure de courant », précise Fabrice Cassin. Compte tenu du contexte économique, il ne sera pas simple de prouver le lien direct de cause à effet.
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