
Veillez bien aux contenus de votre contrat de travail et du règlement intérieur de votre entreprise avant de tenir des propos sujets à polémiques. Ils pourraient être le fondement d’un licenciement en cas de dérapages, a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 20 avril.
« Les opinions que les salariés, quelle que soit leur place dans la hiérarchie professionnelle, émettent dans l'exercice du droit d'expression ne peuvent motiver une sanction ou un licenciement », indique l’article L.2281-3 du Code du travail. Difficile d’être plus clair. Il serait donc possible aux yeux de la loi de tout dire au bureau ? Pas si sûr. Il est indispensable de ne abuser pas abuser de sa liberté d'expression, c’est-à-dire par exemple de ne pas être injurieux, de ne pas créer un trouble dans l’entreprise ou de faire du prosélytisme et de ne pas porter atteinte à l’image de son employeur.
Dans un arrêt rendu le 20 avril, la Cour de cassation a reconnu un licenciement fondé sur des propos banalisant les violences faites aux femmes. Le salarié en question, célèbre animateur d’une émission de divertissement sur France 2, avait à l’époque tenu des propos sexistes qu’il présentait comme relevant de la « blague » à la fin de l’émission. Une polémique et un bad buzz sur les réseaux sociaux s’en étaient suivis. Quelques jours après, l’animateur s’en est amusé et a tenu à plusieurs reprises des propos misogynes et injurieux à l’égard de candidates. La direction de France TV a donc décidé de le licencier pour faute grave.
Une restriction proportionnée au but recherché
La Cour de cassation a estimé que ce licenciement ne portait pas atteinte à la liberté d’expression du salarié. « Au regard des clauses prévues dans le contrat de travail et des circonstances, concernant tant le salarié que l’employeur, qui ont entouré cette « blague », le licenciement ne constituait pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression du salarié », expliquent les juges.
En effet, l’employeur a le droit de restreindre la liberté d’expression de ses salariés, en fonction de la nature des tâches qu’ils accomplissent ou de leurs postes. Cet encadrement doit, toujours, être « proportionné au but recherché ».
Une clause particulière peut être ajoutée dans le contrat de travail de collaborateurs qu’il juge les plus exposé au public, comme les commerciaux. Par cette clause, le salarié accepte de respecter l’ensemble des valeurs de l’entreprise, sous peine de faute grave.
Attention, néanmoins, ces principes doivent être très précis, comme le « respect des droits de la personne », ou le « refus de toute complaisance à l’égard de propos risquant d'exposer une personne ou un groupe de personnes à la haine ou au mépris, notamment pour des motifs fondés sur le sexe », ou encore le refus de la violence.
L'exception des opinions politiques
Une limite existe à cette restriction : celle de la libre expression des opinions politiques. Le Conseil d’Etat, dans une décision du 25 janvier 1989, a posé le principe qu’un employeur ne peut pas interdire dans le règlement intérieur les discussions politiques et religieuses.
Á retenir : l'article 1132-1 du Code du travail « Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte [...], notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat , en raison notamment de ses opinions politiques .» |
Vous êtes donc libres d'exprimer vos idées politiques, à condition de ne pas tomber dans le prosélytisme. Oubliez le port du tee-shirt à l’effigie de votre personnalité politique préférée quand vous êtes au travail ou le mailing à toute l’entreprise partageant le programme de votre candidat ou candidate. Vous ne serez pas licencié, écarté d’un recrutement, d’une nomination, d’un stage, d’une formation car le Code du travail l’interdit. Cependant, les rapports risquent de se compliquer fortement avec votre hiérarchie et vos collègues.
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