Pour la Cour de justice de l’Union européenne, un particulier ne peut pas demander une indemnité à la France si sa santé s'est dégradée à cause de la mauvaise qualité de l'air.

Saisie par la cour administrative de Versailles, la Cour de justice de l’Union européenne a indiqué, dans un arrêt rendu le 22 décembre, que le droit à une indemnisation pour les particuliers pour cause de mauvaise qualité de l’air n’existe pas.

Néanmoins, l'État peut toujours être tenu responsable et condamné par les juridictions nationales s'il ne respecte pas les normes européennes de qualité de l'air.

Un droit aux conditions précises

Un justiciable, vivant en région parisienne depuis de longues années, estimait que son état de santé s’était dégradé sérieusement en raison de la qualité de l’air ambiant.

Cette détérioration est, selon lui, due au fait que les autorités françaises ne respectent pas la valeur limite des niveaux de polluants dans l’air ambiant fixée par une directive européenne du 21 mai 2008. Il a donc saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise en réclamant une indemnisation de 21 millions d'euros pour réparer son préjudice.

Le texte à retenir : La directive européenne 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2008, concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe.
Ce texte fixe la valeur limite des niveaux de polluants dans l’air ambiant.

Débouté en première instance, le justiciable a fait appel.

La cour d’appel de Versailles s’est alors tournée vers la Cour de justice de l’Union européenne avec la question suivante : les particuliers peuvent-ils solliciter une indemnisation de l’État pour des préjudices de santé résultant de dépassements des valeurs limites de concentration en NO2 et en PM10 fixées par les normes du droit de l’Union, et si oui dans quelles conditions ?

Dans un arrêt rendu le 22 décembre, la juridiction européenne répond que ce droit à réparation existe, mais qu’il ne s’applique qu’à certaines conditions.

La règle de droit européenne violée doit avoir pour objet « de leur conférer des droits ». Cette violation doit être « suffisamment caractérisée » et il faut démontrer l’existence d’un « lien de causalité direct entre cette violation et le dommage subi par ces particuliers ».

Dans cette affaire, liée à la pollution de l’air, ce droit à réparation ne peut pas être appliqué car la première condition n’est pas remplie. « Les directives européennes fixant des normes pour la qualité de l’air ambiant n’ont pas, comme telles, pour objet de conférer des droits aux particuliers dont la violation serait susceptible de leur ouvrir un droit à réparation », précise l’arrêt.

La France ne peut donc pas être tenue responsable de dommages sanitaires d'un particulier liées à la mauvaise qualité de l’air.

La mise en cause de l’État par les juridictions nationales

Cependant, « cela n’exclut pas que la responsabilité de l’État puisse être engagée », signifie l’arrêt. Les juges européens insistent : les juridictions nationales peuvent « éventuellement prononcer des injonctions assorties d’astreintes visant à assurer le respect, par cet Etat, des obligations découlant du droit de l'Union ».

D’ailleurs, le Conseil d’État a, a plusieurs reprises, condamné l’État pour ne pas avoir respecté cette directive sur la qualité de l’air.

En juillet 2020, le Conseil d'État avait ordonné au gouvernement d’agir pour améliorer la qualité de l’air dans plusieurs zones en France, sous peine d’une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard. Dans un arrêt du 4 août 2021, la juridiction administrative avait condamné l’État à payer l’astreinte de 10 millions d’euros pour le premier semestre de l’année 2021.

Constatant que la situation ne s’est pas suffisamment améliorée, l’État a de nouveau été condamné à deux astreintes de 10 millions d’euros, le 17 octobre 2022, pour les deux périodes allant de juillet 2021 à janvier 2022 et de janvier à juillet 2022. « À ce jour, les mesures prises par l’État ne garantissent pas que la qualité de l’air s’améliore de telle sorte que les seuils limites de pollution soient respectés dans les délais les plus courts possibles », explique la décision du Conseil d’État.

 

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