Utilisateurs d’Instagram, de TikTok ou de YouTube, vous croulez sans nul doute sous les « story » et autres vidéos vous vantant des produits miracles pour améliorer votre santé. Cette pratique flirte largement avec l'illégalité, nous avons enquêté.

Bien fait des facettes pour des dents parfaitement alignées, produits de blanchissements, compléments alimentaires, cession d’oxygène, la santé est un business comme les autres pour les influenceurs, non professionnels de santé.
Pourtant, en France, la publicité des médicaments est strictement encadrée.

Un contrôle a priori

« En France, il est interdit de faire la promotion auprès du grand public d’un médicament soumis à prescription », indique Anne-France Moreau, avocate, associée du cabinet McDermott. Impossible donc pour des influenceurs, non professionnels de santé, de copier l’américaine Kim Kardashian qui avait fait la promotion sur Instagram d’un médicament contre les nausées de grossesse, prescrit par son médecin. « La publicité auprès du grand public ne peut concerner que les médicaments sans ordonnances et les dispositifs médicaux, sous réserve de formalités auprès de l’Autorité nationale de sécurité du médicament (selon la classe et le remboursement du dispositif médical) », ajoute la spécialiste du secteur de la santé et des sciences de la vie.

En effet, le fabricant ou le laboratoire, qui souhaite faire appel à un influenceur en ce sens, va devoir soumettre le contenu du post ou de la vidéo à l’autorité indépendante avant sa mise en ligne sur les réseaux sociaux. Cette publication ne doit présenter aucun danger pour la santé publique, ne pas être trompeuse et contenir un message informatif. Une fois saisie, l’autorité de sécurité du médicament (ANSM) a deux mois pour donner l’autorisation ou demander des ajustements.

Si le fabricant ou le laboratoire obtient l’autorisation, il est vivement conseillé que le contrat avec l’influenceur contienne le script précis du post ou de la vidéo, pour éviter toute mauvaise surprise.

Un autre point est à prendre en compte : les fonctionnalités « j’aime », « commentaires » et « partage » doivent être désactivées en dessous du post. « Selon l’ANSM, la fonctionnalité « j’aime » peut-être interprétée, si elle est consacrée à un produit de santé, comme une attestation de guérison par le public, ce qui ce qui est contraire à l’article R. 5122-4 du CSP qui interdit les références aux attestations de guérison », précise Anne-France Moreau.

Tout est dans le script

Pourtant, sur Instagram, les influenceurs de téléréalité tels que Fidji Ruiz, Milla Jasmine, Sarah Lopez et bien d’autres, font régulièrement la promotion de produits de santé. Ces personnalités seraient-elles hors la loi ? Pas tout à fait, parce qu’à priori les produits décrits ne sont pas des médicaments, ni des dispositifs médicaux. Elles ne seraient donc pas liées par cette réglementation.

À retenir : La notion de médicament est définie par l’article L 5111-1 du Code de santé publique
« On entend par médicament à usage humain toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l'homme ou pouvant lui être administrée, en vue d'établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier ses fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique. »

Néanmoins, tout va dépendre du discours de l’influenceur. S'il utilise le terme « médicament » ou qu’il laisse sous-entendre que le produit pourrait guérir un mal, réduire des symptômes, il s’expose à des sanctions pour pratiques commerciales trompeuses. « La jurisprudence interprète très largement cette notion de visée médicale et curative », précise la spécialiste du droit de la santé.

Cela été par exemple le cas de Fidji Ruiz (2,1 millions d’abonnés sur Instagram) après sa promotion de « cession d’oxygène », bouteille d’oxygène à la main ou de Maeva Ghennam (3,3 millions d’abonnés sur Instagram) après la promotion de sa chirurgie réparatrice intime qui était purement et simplement de la chirurgie esthétique.

Plus d'information, moins de publicité

Pour prendre le moins de risques possibles, nombreuses sont les entreprises du secteur à faire appel à des influenceurs afin de mettre en avant des informations sur des pathologies touchant un large public comme la migraine ou l’endométriose. Les informations relatives à des maladies n’entrent pas dans le cadre strict de la publicité imposé par le Code de la santé publique. « Beaucoup de laboratoires pharmaceutiques veulent contribuer à l’éducation thérapeutique et une meilleure prise en charge du système de santé », confirme l’avocate.

Ainsi, Novartis France a conclu un partenariat avec le youtubeur Julien Ménielle, à l’origine de la chaîne « Dans ton corps » (719 000 abonnés), pour sensibiliser sur les maladies génétiques rares. De son côté, le laboratoire pharmaceutique Celgene a récemment sponsorisé un article de blog et une vidéo de Louise Roe, une blogueuse et animatrice de télévision britannique, où elle détaille la gestion du psoriasis.

Bon à savoir : Si vous avez le moindre doute sur le produit mis en avant sur les réseaux sociaux, vous pouvez le signaler à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

 

 

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