Russie : La délicate mise en œuvre des sanctions internationales dans la commande publique


L’interdiction d’attribuer des contrats de la commande publique à des entreprises contrôlées par des intérêts russes est difficile à appliquer.

Cette chronique partenaire est proposée par Olivier Giannoni, secrétaire général de l’UGAP et membre du Cercle Montesquieu, association de directeurs juridiques.

Le règlement européen n° 2022/576 du Conseil du 8 avril 2022 interdit l’attribution et la poursuite de l’exécution de contrat de la commande publique avec des intérêts russes dès lors que leur montant est égal ou supérieur aux seuils européens sauf s’ils sont relatifs à la coopération spatiale ou à l’acquisition de sources d’énergie.

Cette interdiction s’est appliquée le 9 avril 2023 aux procédures de passation. En revanche, il était laissé jusqu’au 10 octobre 2022 pour arrêter ou suspendre l’exécution des contrats déjà conclus.

Un long travail de documentation

Le périmètre de cette mesure est vaste et difficile à contrôler. L’interdiction vise d’abord les personnes physiques ou morales de nationalité russe ou établies sur le territoire russe.

Elle s’applique, de plus, lorsque les personnes précédemment décrites détiennent plus de 50% des droits de propriété d’une entité ou qu’elles ont donné mandat à une entité pour agir en leur nom.
Enfin, les sous-traitants ou fournisseurs de second rang qui entreraient dans l’un des cas précédemment énoncés et dont le montant des prestations représenterait plus de 10 % de la valeur du contrat sont aussi concernés.

Afin de simplifier le travail des acheteurs publics, la Commission européenne a admis que le respect de ces obligations pouvait être assuré par une déclaration sur l’honneur des candidats et des titulaires de contrats. Les entreprises doivent, toutefois, s’attendre à ce que des éléments de preuve sur la détention capitalistique puissent être demandés.

Il s’agit là d’un travail de documentation qui doit être anticipé car il peut être fastidieux de recueillir des explications sur l’enchainement de plusieurs rangs de possessions capitalistiques.

Il peut aussi être nécessaire de solliciter d’autres entreprises qui font partie de la chaîne d’approvisionnement (sous-traitant ou de fournisseur de second rang).

Rendre les informations accessibles

Les entreprises doivent également faciliter la compréhension de leur situation et des documents fournis pour plusieurs raisons.

En premier lieu, les acheteurs qui recueillent ces informations ne sont pas forcément habitués à manipuler ce type de documents.

De plus, les bases de données utilisées sont parfois ambiguës, il est donc nécessaire d’informer et de rassurer pour éviter des contre sens et des mauvaises décisions.

Un travail régulier de mise à jour pourra permettre d’anticiper des difficultés. En cas de changement capitalistique concernant le titulaire, ce dernier peut demander une suspension provisoire de l’exécution du contrat en attendant de ne plus remplir les critères de l’interdiction, de proposer la cession du marché ou de modifier la composition du groupement attributaire.

Il évite ainsi une perte financière d’autant que le règlement ne prévoit aucune indemnisation.

L’acheteur peut aussi y trouver son intérêt en évitant une rupture d’exécution ou d’approvisionnement.

En effet, la Commission estime que l’application de ce règlement ne permet pas la conclusion d’un contrat de remplacement sans publicité ni mise en concurrence.

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